Portrait de Lazare Bonifay – Président et cofondateur d’Allergenius
Quel est votre parcours?
Je me considère comme un enfant d’internet et j’ai grandi fasciné par le monde des start-ups et des solutions technologiques. Après le bac, j’ai décidé de faire une école de commerce et je suis entré à l’EM Lyon. J’y ai découvert deux choses : l’entrepreneuriat et le marketing.
En tant que président de la junior entreprise de l’école, j’ai appris à travailler en équipe et je me suis confronté à mes premiers clients. Je me suis spécialisé en branding pour savoir comment positionner une marque et j’ai effectué plusieurs stages et alternances orientés marketing, dans une agence de pub et dans deux grosses boîtes de tech française – Dott et Lydia.
C’est là qu’est née l’envie de créer quelque chose dans la technologie. J’ai poursuivi cette formation par un master en innovation et technologie avec une spécialisation en entrepreneuriat à l’université Paris Panthéon Sorbonne.
J’ai terminé mes études l’an dernier et à 23 ans, j’ai lancé Allergenius avec un ami d’enfance, Antoine Barberin, étudiant à l’ISAE-SUPAERO de Toulouse.
Pourquoi avoir fondé Allergenius?
Il y a quelques années, ma sœur a développé des allergies au gluten, aux crustacés et au kiwi. Pendant des vacances en famille, elle m’a confié combien il lui était difficile de faire ses courses. Elle y passait deux fois plus de temps, à décrypter toutes les étiquettes, à la recherche de traces de ces allergènes dans des produits où elle ne soupçonnait pas qu’ils soient présents et elle trouvait cela extrêmement angoissant.
Au contact d’un allergène, même en quantité infime, une personne allergique risque un choc anaphylactique, une réaction généralisée et potentielle mortelle qui constitue une urgence médicale absolue.
L’allergie est une réaction du système immunitaire qui produit des anticorps pour combattre ce qu’il identifie comme un corps étranger, à la différence de l’intolérance qui touche le système digestif et métabolique et peut être dû à un déficit d’enzyme (comme pour l’intolérance au lactose).
Il est difficile d’avoir des chiffres exactes sur les allergies. Dans une publication de novembre 2025, l’INSERM alerte sur l’augmentation considérable du nombre de personnes allergiques depuis plusieurs décennies et estime que “les allergies alimentaires concerneraient environ 8 % des enfants et 10 % des adultes”. *
Pour aider ma sœur à faire ses courses, j’ai cherché une solution mais il n’en existait pas. Je me suis penché sur le sujet et j’y ai vu une opportunité. J’en ai parlé à un ami ingénieur, Antoine Barberin, et c’est comme ça que nous nous sommes lancés dans le projet d’Allergenius.
Allergenius, c’est quoi ?
Allergenius est une appli très simple qui permet de scanner le code barre d’un produit afin d’identifier rapidement les allergènes et les traces d’allergènes présents. En fonction du profil allergologique renseigné, un feu vert ou rouge s’affiche à l’écran et l’utilisateur sait s’il peut le consommer ou non.
Il faut savoir que depuis la réglementation européenne INCO de 2014, les industriels de l’agro-alimentaire ont l’obligation de signaler sur les étiquettes 14 allergènes majeurs : céréales contenant du gluten (blé, seigle, orge, avoine, épeautre, kamut et leurs souches hybrides), crustacés, Œufs, Poissons, Arachides, Soja, Lait (y compris lactose), Fruits à coques (amandes, noisettes, noix, noix de cajou, pistaches, etc.), Céleri, Moutarde, Graines de sésame, Anhydride sulfureux et sulfites (à partir de 10 mg/kg ou 10 mg/l exprimés en SO₂), Lupin, Mollusques.
Nous avons d’abord cherché à identifier ces allergènes alimentaires. Pour cela, nous utilisons Open Food Facts, une base de données de produits alimentaires en open source. La plateforme recense les ingrédients, allergènes et autres valeurs nutritionnelles de plus de 3 millions de produits de 180 pays.
Mais il ne suffit pas d’avoir accès à cette base de données, il faut aussi pouvoir l’exploiter et analyser la composition des aliments pour détecter les allergènes. Nous avons donc développé une IA spécialisée dans la gestion des faux négatifs.
Nous avons sollicité un médecin allergologue de Fontainebleau, le professeur Edouard Seve pour valider et améliorer notre solution.
Enfin, nous avons fait appel à un designer pour créer l’appli. Elle est gratuite et disponible sur iOS depuis septembre 2024 et sur Androïd depuis août 2025. Il était important pour nous que ce soit gratuit pour améliorer le quotidien des personnes allergiques. Mais nous envisageons de limiter certaines fonctionnalités dans un futur proche pour financer le projet.
Quelles sont les prochaines étapes pour Allergenius ?
Nous venons de développer une nouvelle fonctionnalité avec la recommandation de produits alternatifs quand le produit scanné contient des allergènes pour l’utilisateur. Exemple, en cas d’allergie au gluten, l’appli recommande 5 produits avec les mêmes caractéristiques nutritionnelles et le même classement Nutri Score, mais sans gluten.
Notre business model repose sur une collaboration en btob avec des marques de l’agro-alimentaire qui cherchent à toucher notre communauté hyper spécialisée. Je précise que nous ne donnons pas notre avis sur les produits mis en avant et sur les 5 produits alternatifs que l’appli propose, nous limitons à deux les produits sponsorisés. Nous réfléchissons aussi à développer la solution pour des restaurants qui afficheraient des menus sans allergènes.
Nous cherchons enfin à améliorer la précision de l’analyse des allergènes (au-delà des 14 obligatoirement mentionnés). L’idéal serait d’avoir un jour notre propre base de données. Pour ce qui est des données de santé, nous ne stockons rien aujourd’hui, ces données restent dans le téléphone de l’utilisateur.
Pourquoi êtes-vous membre de la French Care?
En tant que startup santé, il nous a semblé naturel de rejoindre le réseau de La French Care dès le début du projet Allergenius. Nous sommes jeunes dans le business et il est important de pouvoir échanger avec des acteurs engagés. Nous sommes en phase d’accélération du projet et ouverts à toute forme de collaboration avec des personnes intéressées par notre solution.
*Source : Dossier Allergies Inserm (https://www.inserm.fr/dossier/allergies/)
